L'expédition à FATSA
(Mer-Noire)

- Le 5 juillet 1911 : A bord du Phrygie, en rade de Zougouldak ;
Le bateau a quitté Constantinople hier 4 juillet à 6 h du soir et nous sommes arrivés ici ce matin à 6 h. Nous y faisons du charbon car, ici, il y a une mine et comme c'est bon marché, le bateau y charge pour tout son voyage. Nous pensons repartir vers 3h de l'après midi pour arriver vendredi matin à Trébizonde. Nous irons directement à Fatsa sans toucher Samsoum à cause du choléra. Nous avons un temps chaud et une mer d'huile. La Phrygie est un beau bateau de la Cie. Paquet ; nous sommes confortablement installés. J'ai une cabine à 3 couchettes pour moi tout seul, sur le pont, très bien, bonne couchette, électricité, ventilateur. Je connais le commandant ayant déjeuné avec lui au consulat l'an dernier. Le jour de mon départ, il m'avait invité à déjeuné à bord. L'ingénieur Anglais qui nous accompagne est très bien ainsi que le prospecteur qui travaille pour Mr Orosdi.

- Le 10 juillet 1911 : de Fatsa. Juste 2 mots, il est tard et je suis fatigué ayant passé la journée dans la montagne.
Nous sommes arrivés à Fatsa où nous sommes débarqués à 10h20 du matin le 8. et nous y avons couché. Nous sommes repartis de cette ville le 9 à 11h 30 du matin pour arriver au lieu de notre campement après 5 heures de cheval dans la montagne par des chemins très accidentés. Le pays est très joli et nous sommes à 800 mètres d'altitude.C'est une région d'une grande richesse minière. Nous habitons une maisonnette dont les planches laissent passer le jour. J'ai tapissé la pièce avec de la toile d'emballage. Nous avons de bons lits de camp que j'ai achetés à Constantinople. Nous mangeons bien, nous avons des oeufs, des poulets, du lait et des conserves. Aujourd'hui, nous avons parcouru la montagne de 8 heures du matin à 7 heures du soir. Nous avons vu 6 filons dont 2 sont très bons ce qui nous donne de bons espoirs pour la suite. Demain nous passerons toute la journée à cheval.

- Le 14 juillet 1911 : de Fatsa. Le 14 juillet ne nous a pas arrêté dans nos travaux et nous l'avons passé sur les hauteurs et dans le fond d'une galerie. Nous avons cependant pensé à boire à la France au cours de notre déjeuner en plein air, sous la pluie. Nous continuons nos explorations et nous passons nos journées , partie à cheval, partie à pied, de 8 heures du matin jusqu'à la nuit. J'ai un cheval qui marche bien. Nous empruntons des chemins très étroits et sur des pentes à pic. Nous faisons de véritables tours de force sur nos chevaux, ils sont du reste, si bien habitués à la montagne qu'il n'y a aucun danger.
Les filons se multiplient et sont de toute beauté.C'est à un point tel que l'ingénieur qui est avec nous se demande quels sont ceux que l'on doit attaquer.
Nous avons visité aujourd'hui un filon qui est déjà entamé et d'où il a été extrait 50 tonnes de minerai qui ont donné du 24%.

Demain, nous allons terminer d'explorer les régions avoisinantes de notre campement et après cela nous allons aller plus loin, peut-être même pour plusieurs jours, la concession ayant 80 Km carrés. Bref, il y a des espérances superbes et c'est là une affaire merveilleuse. On ne pourra même jamais exploiter le tout car il y a trop de filons.
Nous passons notre vie assez agréablement, départ le matin, déjeuner sur l'herbe, retour le soir, nettoyage, apéritif ou thé, puis dîner et ensuite correspondance.

Nous mangeons bien, on nous apporte du lait, des oeufs, du mouton et ce soir, le bouquet : des truites pêchées dans un torrent. Nous avons de bonnes provisions apportées de Constantinople ainsi que des bons vins (St. Emilion et Médoc) pris à bord du bateau. Aujourd'hui nous avons eu des truites pêchées dans un torrent. Nous avons de bonnes provisions apportées de Constantinople ainsi que des bons vins (St. Emilion et Médoc) pris à bord du bateau. Tout va bien.

Tous les jours nous sommes à cheval et j'en ai un qui marche bien. Nous empruntons des chemins très étroits et sur des pentes à pic. Nous faisons de véritables tours de force sur nos chevaux, ils sont du reste, si bien habitués à la montagne qu'il n'y a aucun danger.

Demain nous irons rendre visite au brigand (?) de la région qui manifeste le désir de nous voir. Nous y serons très bien reçu car un de ceux qui nous accompagnent est en bon terme avec lui.

Depuis mon départ je n'ai aucune nouvelle de qui que ce soit de sorte que je ne sais pas ce que devient mon affaire. Je crois que tout a craqué dansl'zntre temps.

- Le 19 juillet 1911 : de Fatsa. Je pensais recevoir des lettres avant-hier, mais le courrier n'est pas venu parce que le bateau n'a pas touché Samsoun.
Nous avons vu avant-hier un filon épatant, visible sur 2 km ayant une largeur de 4 mètres. C'est une région très riche et très prometteuse. L'ingénieur est enchanté et dit qu'il y a de grands espoirs mais malheureusement comme aucun travail n'a été fait il ne peut avoir pleine certitude son opinion personnelle est qu'il n'a jamais vu une contrée aussi riche. Nous sommes allé assez loin et nous avons fait 6 heures de cheval. Nous étions accompagnés de 4 hommes armés de fusils de guerre dont nous n'avons pas eu à nous servir.
Hier, même exploration, mais un peu plus longue. Nous étions à 1 200 mètres d'altitude, perdu dans les nuages et au retour, nous avons été pendant 2 heures sous une pluie battante et les chevaux avaient grand peine à marcher.
Je dois partir d'ici le samedi 22 juillet et pense être à Constantinople mardi matin.

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©Yves SALMON  juin 2005
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